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Prescription du favoritisme et instructions du procureur

Cour de cassation, chambre criminelle, 6 octobre 2010, N° 10-82839

Les instructions données par le procureur de la République aux fins d’enquête interrompent-elles la prescription de l’action publique ?


 [1]

Oui. Interrompt ainsi la prescription de l’action publique, le procureur de la République qui, sur signalement d’un président de Conseil général, ordonne via une note, l’ouverture d’une enquête préliminaire concernant l’attribution de marchés publics.


En juillet 1999, à la suite d’un signalement d’un président d’un conseil général, le procureur de la République ordonne une enquête préliminaire concernant l’attribution de marchés publics à différentes sociétés de service.

Il ressort de l’enquête que des marchés d’études ont été attribués sur simples factures à plusieurs sociétés dont une seule avait réalisé des prestations, les autres étant de simples sociétés écrans.

Le gérant de la société principale est poursuivi pour recel et complicité de favoritisme pour avoir établi ou fait établir de fausses factures à l’en-tête desdites sociétés.

Il soulève la prescription de l’action publique, le marché ayant été conclu depuis plus de trois ans.
L’argument est rejeté par les juges du fond, ce que confirme la Cour de cassation :

" les instructions du procureur de la République aux fins d’enquête constituent un acte interruptif de prescription".

Sur le fond la condamnation du gérant à deux ans d’emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d’amende est confirmée, la Cour de cassation approuvant les juges du fond d’avoir jugé que :

" l’ensemble des missions réparties entre les différentes sociétés formaient un bloc homogène dépassant le seuil de 300 000 francs par an, prévu à l’article 321 du code des marchés publics alors applicable".

En outre il est établi que "le gérant, dans le souci d’éluder les règles contraignantes de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics, a donné des instructions aux dirigeants des sociétés écrans et leur a apporté son assistance, en les mettant en relation avec le conseil général ou en leur donnant des modèles de factures à faire parvenir à celui-ci".

Cour de cassation, chambre criminelle, 6 octobre 2010, N° 10-82839

[1Photo : © Dolnikov Denys