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Association : délit d’entrave au comité d’entreprise

cass. crim. 3 février 2004 Bulletin

Création ou prise de participation ?

Dans tous les cas "importants", le comité central d’entreprise DOIT être convoqué.

Une association pour la sauvegarde de l’enfance a pour projet d’acquérir un immeuble dans lequel une autre association exploite une maison de retraite. Pour ce faire, les deux entités décident, dans la perspective d’une absorption, de constituer une société civile immobilière avec participation majoritaire de l’association pour la sauvegarde de l’enfance.

Un syndicat, estimant que le comité d’entreprise aurait dû être consulté, fait citer directement le directeur général de l’association devant le tribunal correctionnel du chef d’entrave à son fonctionnement. L’affaire est portée devant la Cour d’appel de Toulouse qui le 16 janvier 2003 condamne le dirigeant à 1500 euros d’amende aux motifs que :

1° "L’article L. 435-3 du Code du travail, qui dispose que le comité central d’entreprise exerce les attributions économiques qui concernent la marche générale de l’entreprise et est informé et consulté sur tous les projets économiques et financiers importants concernant l’entreprise, renvoie à l’article L. 432-1 du même Code, qui prévoit que le chef d’entreprise est tenu de consulter le comité d’entreprise lorsqu’il prend une participation dans une société ; que le texte ne fait aucune différence entre la prise de participation dans une société déjà existante et celle qui intervient lors de la création d’une société".

2° "l’importance d’une opération telle que la création d’une SCI doit s’apprécier non pas en fonction de ses effets immédiats, mais en considérant l’économie globale de l’opération, et notamment les obligations pesant sur l’entreprise à la suite des engagements qu’elle a contractés à cette occasion ; que, dans une société civile, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social ; qu’en raison de sa position largement dominante dans la SCI, l’association d’aide à l’enfance peut être amenée à répondre de la quasi-totalité du passif de cette société ; qu’à ce jour la SCI n’a réalisé qu’une seule opération immobilière, consistant en l’acquisition et la gestion d’une maison de retraite, mais la structure existe et rien n’interdit à la SCI d’effectuer d’autres opérations ; que, compte tenu des conséquences possibles de la création d’une telle société, les institutions représentatives du personnel auraient dû au préalable être informées".

Le prévenu se pourvoit alors en cassation en relevant :

1° qu’il n’était légalement tenu de consulter le comité d’entreprise qu’en cas de prise de participation dans une société existante et non pour la création d’une société.

2° qu’en vertu des articles L. 432-1, alinéa 9, et L. 435-3 du Code du travail combinés, le comité central d’entreprise doit uniquement être informé et consulté sur les projets économiques et financiers "importants" c’est-à-dire ayant une forte incidence sur la situation des salariés et revêtant un caractère général et non temporaire. Or en l’espèce le projet de création de la SCI ne générait la création d’aucun poste, il n’avait aucun effet à l’égard des salariés de l’association et avait, en outre, un caractère purement ponctuel en ce qu’il a été mis en œuvre dans l’attente de l’autorisation d’opérer une fusion absorption entre les deux associations dont le projet a été régulièrement exposé au comité central d’entreprise.

3° "que sont seules prises en compte, pour apprécier l’importance des effets d’un projet économique et financier afin de déterminer si le comité central d’entreprise doit être préalablement informé et consulté, les conséquences prévisibles, et donc les répercussions directes que ce projet a, concernant l’organisation et la marche générale de l’entreprise ; qu’en se fondant, pour considérer que le délit d’entrave était constitué, sur l’importance, pour l’association, des seules "conséquences possibles", et donc purement hypothétiques, du projet de création de la SCI la cour d’appel a violé l’article L. 435-2 du Code du travail".

La Cour de cassation (cass. crim. 3 février 2004 n° de pourvoi : 03-80784 publié au bulletin) n’en confirme pas moins la condamnation du dirigeant de l’association en relevant que :

1° "L’article L. 432-1 du Code du travail auquel renvoie l’article L. 435-3 du même Code n’établit aucune distinction selon que l’entreprise prend une participation dans une société déjà constituée ou à constituer ;

2° "Lorsque l’entreprise prend une participation dans une société, le chef d’entreprise est tenu, selon les mêmes textes, de consulter le comité sans que cette obligation soit limitée aux seuls projets économiques et financiers importants".