Cartes nationales d’identité (CNI) et passeports : le régime d’indemnisation des communes instauré par l’article 103 de la loi du 30 décembre 2008 est-il conforme à la Constitution ?
[1]
Oui dès lors que :
1° "les compétences confiées aux maires au titre de la délivrance de cartes nationales d’identité et de passeports sont exercées au nom de l’Etat"
2° le législateur a ainsi "entendu réparer de façon égalitaire les conséquences des décrets ayant mis de façon irrégulière à la charge des communes des dépenses relevant de l’Etat" et "qu’il n’a pas institué des restrictions disproportionnées par rapport aux objectifs d’intérêt général qu’il s’est assignés" ;
3° bénéficient d’une indemnisation de leur préjudice non seulement les communes ayant engagé un contentieux mais également toutes celles ayant supporté ces dépenses.
L’article 103 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 a prévu une dotation d’un montant de 3 € par titre dans la limite de 97,5 millions d’euros en contrepartie d’une sorte de renonciation à recours [2]. Cet article tire les conséquences des décisions du Conseil d’Etat aux termes desquelles seul le législateur est compétent pour imposer indirectement aux communes des dépenses relevant de l’Etat,
Jugeant ce dispositif contraire à la péréquation financière entre collectivités territoriales, à leur libre administration, à leur autonomie financière, au principe de responsabilité, au droit de propriété, à la garantie des droits et à la séparation des pouvoirs, deux communes saisissent le Conseil Constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité.
Le Conseil Constitutionnel rejette l’argumentation et déclare le dispositif conforme à la Constitution :
1° Le principe de libre administration des collectivités territoriales n’est pas en cause dès lors que "les compétences confiées aux maires au titre de la délivrance de cartes nationales d’identité et de passeports sont exercées au nom de l’Etat". Les dispositions de l’article 72-2 de la Constitution ne peuvent en effet être invoquées que lorsque sont en jeu les compétences exercées par les collectivités territoriales.
2° Le législateur a entendu réparer de façon égalitaire les conséquences des décrets ayant mis de façon irrégulière à la charge des communes des dépenses relevant de l’Etat et n’a pas institué des restrictions disproportionnées par rapport aux objectifs d’intérêt général qu’il s’est assignés.
3° S’il est interdit aux communes de se prévaloir, sur le fondement de l’incompétence du pouvoir réglementaire, d’un préjudice correspondant aux dépenses résultant de l’exercice par les maires des missions de réception et de saisie des demandes de cartes nationales d’identité et de passeports ainsi que de remise aux intéressés de ces titres, le législateur institue une dotation forfaitaire destinée à compenser cette charge.
4° Les dispositions contestées respectent les décisions passées en force de chose jugée et font bénéficier d’une indemnisation de leur préjudice non seulement les communes ayant engagé un contentieux mais également toutes celles ayant supporté ces dépenses.
Décision n° 2010-29/37 QPC du 22 septembre 2010 NOR : CSCX1024332S
Références
– Article 103 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008
– Article L1611-2-1 du code général des collectivités territoriales
– Article 72-2 de la Constitution
Voir aussi :
[1] Photo : © Marc Dietrich
[2] « Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les communes ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l’incompétence du pouvoir réglementaire à mettre à leur charge les dépenses résultant, postérieurement au 25 novembre 1999, de l’exercice par les maires des missions de réception et de saisie des demandes de cartes nationales d’identité ainsi que de remise aux intéressés de ces titres, d’un préjudice correspondant à ces dépenses. »
« Sous réserve des décisions passées en force de chose jugée, les communes ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l’incompétence du pouvoir réglementaire à mettre à leur charge les dépenses résultant, postérieurement au 26 février 2001, de l’exercice par les maires des missions de réception et de saisie des demandes de passeports ainsi que de remise aux intéressés de ces titres, d’un préjudice correspondant à ces dépenses. »