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I – Réformer (préciser) la notion d’intérêt « quelconque »

1°- La notion d’intérêt « {quelconque} » : aucune délimitation précise ni par le texte ni par la jurisprudence

En prélude à la journée d’étude de l’observatoire du 25 juin 2010 retrouvez le point de vue de Me Levent Saban [1] sur la nécessité d’une réforme du délit de prise illégale d’intérêts.


 [2]

Dire que l’intérêt pénalement reprochable peut être « quelconque », c’est rendre possible la poursuite pénale de toutes les sortes d’intérêts, même purement moral (ce qui est déjà reconnu par la jurisprudence) voire « politique » au bon sens du terme. Est-il utile de rappeler que toutes les délibérations d’une collectivité sont prises dans l’intérêt « général », et même dans l’intérêt « particulier » de la collectivité concerné, il s’agit ici d’une condition juridique de validité de la délibération (intérêt communal, départemental, régional, communautaire...).

On a même vu un juge d’instruction, pour caractériser l’intérêt pris par des conseillers généraux dans le cadre du vote pour l’attribution d’un marché de transport scolaire lancé par le Département, demander à ceux-ci s’ils avaient des enfants scolarisés qui allaient « profiter » du marché de transport scolaire !

C’est évidemment aussi réducteur que de reprocher à un maire d’avoir un proche (enfant, neveu, petit neveu…) qui bénéficie d’un service communal (cantine scolaire, crèche municipale…).

Il est urgent pour le législateur de reprendre la définition de la notion d’intérêt pénalement reprochable, et mettre fin à l’idée que toute sorte de prise d’intérêts est punissable pour l’élu, alors que le législateur n’a voulu poursuivre que les prises d’intérêt personnel et étrangères au mandat de l’élu.

On rappellera que le délit de prise illégale d’intérêts (article 432-12 du Code pénal) est inscrit parmi les infractions de la section intitulée : « Des manquements au devoir de probité ». L’intitulé de la section sous laquelle l’infraction est inscrite renvoie donc à une prise d’intérêt qui soit « personnelle » et « étrangère » au mandat poursuivi.

Il convient donc de revenir à l’esprit du législateur qui était de sanctionner les manquements au devoir de probité, et non les délits purement formels de « conflits objectifs d’intérêts », pour lesquels même les juges reconnaissent dans leur décision de condamnation de principe l’absence de profit tiré par l’élu ou l’absence d’intérêt personnel de l’élu dans la participation à la délibération reprochée…


Sommaire

 A titre préliminaire, rappel du contenu de l’arrêt du 22/10/08 (Ch.Crim., Ccass)


I – Réformer (préciser) la notion d’intérêt « quelconque »

1°- La notion d’intérêt « quelconque » : aucune délimitation précise ni par le texte ni par la jurisprudence

2° - Mettre en concordance jurisprudence administrative et judiciaire

3°- Mettre fin à la situation de « blocage » des collectivités

4°- La proposition de loi, si elle est retenue dans sa rédaction proposée, continuera d’intégrer dans son champ toutes les « manquements au devoir de probité » des élus


II – Renforcer l’élément intentionnel en ajoutant « sciemment » ?


III – Réformer la notion de « surveillance » de l’opération

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[1Me Levent SABAN, avocat spécialisé dans la défense pénale des élus, a été auditionné le 31 mars 2010 par Madame Anne-Marie ESCOFFIER, sénateur désigné rapporteur pour la Commission des Lois sur la proposition de loi n°268 déposée au Sénat par Bernard SAUGEY

[2Photo : © ArtmannWitte