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La jurisprudence de la semaine du 8 au 12 février 2010

Retrouvez une sélection de décisions de justice intéressant les collectivités locales et les associations.

(dernière mise à jour le 28/03/2011)

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Jurisprudence constitutionnelle

  Les modalités de répartition des attributions territoriales de l’Etat entre le préfet de région et le préfet de département relèvent-elles de la compétence du pouvoir législatif ou du pouvoir réglementaire ?

Elles relèvent de la compétence du pouvoir réglementaire. En effet "elles ne mettent en cause ni les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources, qui relèvent de la loi en vertu des articles 34, 72 et 72-2 de la Constitution, ni aucun autre principe ou règle placés par la Constitution dans le domaine de la loi".

Décision n° 2010-219 L du 11 février 2010 NOR : CSCX1004421S


 La lOI n° 2010-145 du 16 février 2010 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux est-elle conforme à la Constitution ?

Oui :

"En réduisant de six à quatre ans le mandat des conseillers régionaux qui seront élus en 2010 et de six à trois ans celui des conseillers généraux qui seront élus en 2011, le législateur n’a porté atteinte à la durée d’aucun mandat en cours" mais "il a entendu que ces nouveaux mandats arrivent à échéance concomitamment dans la perspective d’une réforme future".

Si la réforme "dépend de textes qui n’ont pas été promulgués ou même adoptés, le législateur était fondé, pour assurer le respect des exigences de clarté et de loyauté de l’élection des conseillers régionaux, en 2010, et des conseillers généraux, en 2011, à modifier la durée des mandats avant ces scrutins".

"Au demeurant, la concomitance des scrutins peut également trouver une justification dans l’objectif de favoriser une plus forte participation du corps électoral à chacune de ces consultations".

Décision n° 2010-603 DC du 11 février 2010 NOR : CSCL1004224S


Jurisprudence judiciaire

 Responsabilité pénale - Corruption

Le tribunal correctionnel de Versailles condamne plusieurs chef d’entreprise et cadres de collectivités locales (conseil général et commune) dans une affaire de corruption. Il est reproché aux fonctionnaires d’avoir profité de voyages à l’étranger et de sommes d’argent et d’avoir fourni, en contrepartie, des informations privilégiées à des candidats à des marchés publics entre 1999 et 2002. Le Conseil général obtient plus de 350 000 de dommages intérêts. Un syndicat d’agglomération nouvelle, également partie civile, se voit allouer 1250 000 euros de dommages-intérêts.

Tribunal correctionnel de Versailles, 8 février 2010.


 Responsabilité pénale - Corruption et détournement de fonds publics

Le tribunal correctionnel de Strasbourg condamne 6 policiers municipaux d’une ville du Bas-Rhin (12 000 habitants) pour corruption passive et détournement de fonds publics. C’est le nouveau maire, élu aux élections de mars 2008, qui a porté plainte. A l’occasion de la redéfinition des missions de la police municipale, un système de malversations dans l’encaissement des droits de place dans les marchés municipaux a été mis à jour. Les sommes prélevées correspondait à l’équivalent d’un 14ème mois. Le chef du service est condamné 2 ans de prison avec sursis, 10 000 euros d’amende et interdiction définitive d’exercer un emploi dans la fonction publique. Ses subordonnés écopent pour leur part de peines de prison avec sursis et d’interdictions d’exercer une fonction dans la police municipale pour des périodes de 6 mois à un an. Les 6 co-prévenus sont en outre condamnés à verser 70 000 euros de dommages-intérêts à la ville qui s’est constituée partie civile.

Tribunal correctionnel de Strasbourg, 10 février 2010


Jurisprudence administrative

 DSP : quelle est la durée normale d’amortissement des installations susceptible d’être retenue par une collectivité délégante ? Comment évaluer la durée maximale de la délégation ?

1° "La durée normale d’amortissement des installations susceptible d’être retenue par une collectivité délégante peut être la durée normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d’exploitation et d’investissement, compte tenu des contraintes d’exploitation liées à la nature du service et des exigences du délégant, ainsi que de la prévision des tarifs payés par les usagers, que cette durée coïncide ou non avec la durée de l’amortissement comptable des investissements" ;

2° "Le point de départ de l’amortissement étant la date d’achèvement des investissements et de mise en service de l’ouvrage, il convient, afin d’évaluer la durée maximale de la délégation, d’ajouter le temps nécessaire à la réalisation de ces investissements à leur durée normale d’amortissement" ;

Conseil d’État, 8 février 2010, N° 323158


 Une promesse d’embauche faite par le maire à un demandeur d’emploi lie-t-elle le conseil municipal ?

Non dès lors que l’emploi n’a pas été créé au tableau des effectifs de la commune par un vote du conseil municipal. Dès lors que le conseil municipal refuse de créer l’emploi, le maire est tenu de rapporter sa décision de recruter. L’agent n’ayant pas été recruté n’a droit à aucune indemnité de licenciement. Cependant en donnant des assurances expresses à un demandeur d’emploi quant à sa nomination, le maire commet une faute de nature à engager la responsabilité de la commune. Le demandeur d’emploi est fondé à demander à être indemnisé du préjudice moral résultant pour lui de la promesse non tenue.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 9 février 2010, N° 09BX01253


 L’exercice de l’action disciplinaire est-il enfermé dans un délai ?

Non. "Aucun texte n’enferme dans un délai déterminé l’exercice de l’action disciplinaire". Ainsi un maire peut, pour apprécier le comportement général de l’intéressé, légalement prendre en considération des faits commis par l’agent quatre ans plus tôt et ce même si ces faits (menaces physiques à l’encontre du DGS) ont été sanctionnés.

Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 9 février 2010, N° 08BX02355


 Une commune peut-elle engager sa responsabilité si malgré les interdictions de stationnement et la pose de bornes anti-stationnement, un particulier est régulièrement gêné pour sortir de chez lui en raison du comportement incivique de certains automobilistes ?

Oui si l’interdiction de stationnement et l’installation de bornes anti-stationnement restent insuffisants pour empêcher le stationnement des automobilistes devant les portails de l’habitation.

En s’abstenant de prendre toute mesure complémentaire et de procéder à de nouveaux aménagements l’administration municipale n’a pas mis en œuvre les moyens suffisants pour assurer l’exécution de l’interdiction de stationnement édictée par l’arrêté du maire.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 9 février 2010, N° 07VE01197


 Le règlement intérieur d’une commission administrative paritaire peut-il faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ?

Oui dès lors "que ce règlement intérieur, qui énonce les règles de fonctionnement des commissions et édicte les droits et obligations de leurs membres, présente le caractère d’un acte faisant grief" et non celui d’une mesure d’ordre intérieur.

Conseil d’État, 10 février 2010, N° 314648


 Un plan local d’urbanisme peut-il être annulé faute d’avoir être précédé d’une délibération du conseil municipal précisant les objectifs poursuivis par la commune et les modalités de la concertation ?

Oui la délibération du conseil municipal doit porter, d’une part, et au moins dans leurs grandes lignes, sur les objectifs poursuivis par la commune en projetant d’élaborer ou de réviser un document d’urbanisme, d’autre part, sur les modalités de la concertation avec les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées. A défaut, le document d’urbanisme est illégal et ce même si la concertation aurait respecté les modalités définies par le conseil municipal.

Conseil d’Etat, 10 février 2010, nº 327149


 Le décret du 19 décembre 2008 relevant à 20 000 euros le seuil en dessous duquel les acheteurs publics sont dispensés de publicité et de mise en concurrence est-il compatible avec les grands principes de la commande publique ?

Non. « En relevant de 4 000 à 20 000 euros, de manière générale, le montant en deçà duquel tous les marchés entrant dans le champ de l’article 28 du code des marchés publics sont dispensés de toute publicité et mise en concurrence, le pouvoir réglementaire a méconnu les principes d’égalité d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ». Les dispositions du décret du 19 décembre 2008 relevant à 20 000 euros le seuil en deçà duquel les acheteurs publics sont dispensés de mise en concurrence et de publicité sont annulées à compter du 1er mai 2010 sous réserve des actions déjà exercées avant le 10 février 2010 contre des marchés pris sur le fondement de l’article 28 (Les actions engagées avant la décision du Conseil d’Etat du 10 février 2010 contre des marchés pris sur le fondement de l’article 28 du code des marchés publics seront jugées en tenant compte de l’annulation du décret).

Conseil d’Etat, 10 février 2010, N° 329100


 L’administration est-elle tenue d’accuser réception des demandes qui lui sont présentées ?

Oui. Il résulte des dispositions de l’article 19 de loi du 12 avril 2000 que toute demande adressée à une autorité administrative (sauf les demandes qui présentent un caractère abusif, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique) doit faire l’objet d’un accusé de réception délivré dans des conditions définies par le décret n°2001-492 du 6 juin 2001. L’accusé de réception doit notamment mentionner la date de réception de la demande et la date à laquelle elle sera considérée comme acceptée ou rejetée en l’absence de décision explicite et les délais et voies de recours. A défaut, les délais de recours ne sont pas opposables à l’auteur de la demande (sauf lorsqu’une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l’expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite). Ainsi, en l’espèce, le recours contre le décret du 19 décembre 2008 est jugé recevable bien qu’il ait été introduit en juin 2009 faute pour le premier ministre d’avoir accusé réception dans les formes requises de la demande d’abrogation qui lui a été présentée.

Conseil d’Etat, 10 février 2010, N° 329100


 La présence de tous les conseillers municipaux peut-elle couvrir une irrégularité des convocations et éviter la nullité des délibérations prises ?

Non. La méconnaissance des règles de convocation "est de nature à entacher d’illégalité les délibérations prises par le conseil municipal, alors même que les conseillers municipaux concernés auraient été présents ou représentés lors de la séance".

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 11 février 2010, N° 09VE00406


 La promesse d’une subvention non tenue est-elle de nature à engager la responsabilité de la commune ?

Non dès lors que la promesse de subvention était clairement subordonnée au vote annuel par le conseil municipal d’une délibération en ce sens.

Cour Administrative d’Appel de Versailles, 11 février 2010, N° 09VE00406

[1Photo :© Gary Blakeley