Le portail juridique des risques
de la vie territoriale & associative

Le droit des collectivités déborde d’énergie

Par Pascale Idoux et Grégory Kalflèche

En partenariat avec la Revue Lamy des Collectivités Territoriales, retrouvez l’éditorial des professeurs Idoux et Kalflèche qui s’interrogent sur la place du droit de l’énergie et son articulation avec d’autres branches du droit : droit des collectivités territoriales, droit de l’urbanisme, droit public des affaires, commande publique... Le droit de l’énergie une matière nouvelle ? Assurément non.

 [1]

Le droit de l’énergie est-il une matière nouvelle ? On pourrait le penser depuis l’édiction de la partie législative du Code de l’énergie par l’ordonnance n°-2011-504 du 9-mai 2011. Doit-on pour autant se référer à ce texte pour envisager l’énergie comme un ensemble qui se détacherait des autres droits- ? Assurément non. Le code n’est que la reconnaissance d’un ensemble de normes spéciales, il ne fait que montrer, au contraire, une actualité de ces questions qui irrigue les autres branches du droit. Le droit des collectivités territoriales d’abord- : ce sont bien les collectivités qui sont chargées de la gestion des services publics (y compris l’électricité et le gaz, art. L.-2224-31 CGCT et L.-322-10 du C. énerg.) et du droit de l’urbanisme sans lequel la plupart des installations éoliennes ou photovoltaïques ne peuvent être implantées. Le droit public des affaires ensuite- : le droit de l’énergie renouvelle en effet plusieurs de ses pans en montrant, le plus souvent, un partage des rôles tout à fait symbolique entre le marché et les personnes publiques.

En matière de commande publique, les opérateurs d’énergie sont des entités adjudicatrices en tant qu’elles exercent des activités d’opérateurs de réseau, c’est-à-dire de production, de transport ou de distribution d’électricité, de gaz ou de chaleur, notamment. Elles sont ainsi soumises à la deuxième partie du Code des marchés publics ou à l’ordonnance du 6 juin 2005 selon leur statut. La nature de leurs contrats est ainsi complexe, parfois contrats administratifs soumis au juge administratif, parfois contrats de droit privé. Cette question que l’on rencontre avec les opérateurs « -historiques- » qui sont passés du statut d’établissement public à celui de société commerciale se double de cas dans lesquels le contrat est – ou non – l’accessoire d’un autre contrat de droit public, voire un contrat administratif par qualification directe de la loi (cf. notre chronique p.29).

En matière de régulation et de concurrence, les collectivités font partie des clients suspendus au fil d’ajustements tarifaires complexes, qui nourrissent un important contentieux devant le Conseil d’État. Certaines accueillent par ailleurs sur leur territoire des installations de production ou de transport dont la construction, l’exploitation, la surveillance, le renouvellement et parfois la fin de vie sont au cœur des délicats arbitrages qu’impliquent une concurrence équilibrée et un développement durable.

Enfin, même lorsque la propriété des installations stratégiques a été dévolue à une société anonyme opérant largement à l’étranger comme en témoigne l’actualité d’EDF et de GDF Suez, c’est bien une quasi-domanialité publique qui s’applique, afin de garantir le cas échéant la sauvegarde d’intérêts publics supérieurs.

À bien des égards, les questions énergétiques sont donc emblématiques
de la richesse et de la vivacité du droit public des affaires, ainsi que la Chronique de droit public des affaires de la RLCT vous rend régulièrement compte !

Le sommaire de la Revue Lamy des Collectivités Territoriales de novembre 2013

[1Pascale Idoux, Professeur de droit public à l’Université de Montpellier 1 CREAM (EA 2038) et Grégory Kalflèche, Professeur de droit public à l’Université Toulouse 1 - Capitole, Institut Maurice Hauriou (IMH)